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Comment est venue lidée de ta dernière
publication, À bâtons rompus, avec Adrian Frutiger ?
Au
départ, il y avait la plaquette d’une exposition qu’il avait
réalisée en 1968 à Villeurbanne, près de
Lyon. Elle reproduisait principalement les panneaux de cette expo sur
les principaux enseignements de l’ouvre d’Adrian. Il m’a fourni en désordre
différents documents iconographiques et des textes, me demandant
d’en faire un livre. Il m’a fallu organiser l’ensemble, réécrire
en bon français (sa langue maternelle est l’allemand), compléter
les textes et leur donner une touche didactique. J’ai même ajouté
au discours différents éléments comme la quasi
totalité du premier chapitre concernant les origines et l’histoire
des écritures puis celles des caractères typographiques.
Tout s’est fait, bien sûr, dans le dialogue et le respect amical
de nos connaissances complémentaires.
Tu habites à deux pas de Lurs-en-Provence.
À cause des Rencontres de Lure dont tu es lun des piliers
?
Non, pas du tout, c’est l’inverse qui s’est passé.
C’est le fait d’être venu en Haute-Provence en 1968 qui m’a fait
rencontrer des personnages comme Antoine Rico, imprimeur à Manosque,
qui m’a fait connaître Jean Giono et Maximilien Vox, le créateur
des Rencontres. Je suis membre de cette association depuis 1969, ça
va faire 33 ans.
Quant à en être l’un des piliers, c’est beaucoup dire.
C’est à Lurs que j’ai appris la plus grande partie de mes connaissances
professionnelles actuelles. C’est à mon tour de transmettre ce
que les aînés m’ont transmis, c’est tout et c’est normal.
Quels sont tes prochains projets éditoriaux
?
Il y a Adrian Frutiger qui m’annonce pour bientôt
un manuscrit axé sur la transmission des connaissances. C’est
l’une de ces principales préoccupations : il se considère
comme un simple maillon d’une longue chaîne, avec des maillons
avant lui et d’autres après lui que sont ces jeunes créateurs
typographes dont certaines réalisations l’émerveillent.
Ladislas Mandel, est en train d’écrire un livre concernant la
création de caractères numérisés et les
pièges à éviter. C’est vrai qu’il est l’inventeur
de la prédigitilisation, c’est-à-dire la déformation
volontaire du dessin des lettres qui anticipe la déformation
due à la pixellisation numérique, ce qui permet de rétablir,
en final, le dessin désiré.
Et moi-même, qui dois écrire « à ma façon
» une Histoire de la typographie destinée au plus grand
nombre. Maintenant, je possède l’essentiel des connaissances
à transmettre et me suis fait une photothèque de près
de 1 000 reproductions de documents typographiques chronologiques dont
l’essentiel provient des ouvrages clés de la bibliothèque
de Ladislas Mandel. Ce qui me manque principalement, c’est le temps,
mais petit à petit j’y arriverai bien. James Mosley, ce célèbre
historien de la typographie londonien, m’a promis de me corriger et
d’écrire l’introduction.
La partie historique de À
bâtons rompus, que j’ai donc réalisée, m’a
servi de ballon d’essai et pour le format de l’ouvrage, pour le principe
des contenus (qui seront bien plus développés évidemment)
et pour la mise en page qui fonctionne bien.
Et, pour terminer, comment vois-tu lavenir de
lAtelier Perrousseaux
?
Je vais sur mes 62 ans et ma femme également.
Dans trois ans j’aurais acquis le nombre de trimestres de cotisation
sociale me permettant de toucher une retraite. Or ma femme (qui est
la gérante de la SARL) est fatiguée et ne veut plus continuer
au-delà de cette date.
Ou bien alors, l’Atelier s’arrête purement et simplement, ce qui
serait dommage. Ou bien d’ici là, on trouve une formule avec
d’autres gens intéressés à poursuivre l’aventure
et prendre notre relève, à Paris ou ailleurs, mais en
tout cas plus dans notre maison.
À
ce moment, je m’inscrirai à la Maison des Artistes, ce qui me
permettra de continuer à réaliser, chez moi, des mises
en page (même à temps partiel, car je ne m’imagine pas
arrêter complètement mon activité typo) et de conseiller
ceux qui prendront notre relève, mais je ne pourrai vendre que
de la matière grise et artistique et non plus des produits fabriqués
comme actuellement les livres.
Actuellement, notre activité éditoriale, si elle est appréciée,
ne permet pas de vivre confortablement : l’argent qui reste sert à
payer les rééditions et les nouveaux ouvrages, mais pas
à dégager en plus des salaires normaux. Nos revenus proviennent
essentiellement des travaux graphiques annexes pour des clients extérieurs.
Notre
toute petite structure est empirique et nous n’avons jamais eu ni le
temps, ni les connaissances, ni les moyens financiers pour la développer.
Par exemple, il faudrait une activité commerciale et marketing
digne de ce nom (et non pas un saupoudrage occasionnel comme nous l’avons
toujours fait). Nous avons de bons produits qui correspondent à
des besoins, en particulier les deux miens (Manuel
de typographie française élémentaire
et Mise
en page et impression) ainsi que celui d’Emmanuel Florio
: Guide de la couleur et de l’image imprimée. Ce sont trois ouvrages
d’apprentissage (les autres livres que nous éditons sont plutôt
des ouvrages de culture typographique et graphique). Il y a un marché
: des centaines de milliers de clients potentiels sont concernées,
mais jamais nous n’avons attaqué commercialement les entreprises,
les collectivités, l’Éducation nationale, comme il aurait
fallu, surtout à 800 km de Paris.
Pour qu’une continuation soit donnée à notre activité
actuelle, c’est d’abord cela qui devra être mis en place. C’est
le maillon faible, tous les autres fonctionnant fort bien. Nous sommes
ouverts à toute proposition et avons deux bonnes années
devant nous pour trouver la meilleure solution.
Site web: Atelier
Perrousseaux
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